Echos, Maja Bajevic
Le Centre Culturel Jean-Cocteau invite l’artiste franco-bosnienne Maja Bajevic (Sarajevo, 1967) à présenter Echos, sa première exposition personnelle dans une institution publique française. Artiste de renommée internationale, Maja Bajevic se réfugie à Paris lors du conflit yougoslave au début des années 1990. Cette épreuve anime chez elle une profonde réflexion sur la construction politique des identités et les fractures sociales et historiques de notre temps. D’artiste exilée, elle devient artiste nomade vivant entre Paris, Berlin, Venise et Sarajevo. A travers la performance, la vidéo et l’installation, elle tisse son expérience avec des histoires individuelles et collectives pour construire une mémoire commune.
Les œuvres existantes et celles produites spécifiquement pour Echos portent les voix de résistant.es et de victimes des répressions du XXème et XXIème siècle dans un hymne à l’humanité. A travers un travail de recherche et de collecte dans les archives et les médias, Maja Bajevic compose une polyphonie de récits, invitant le visiteur à les découvrir en traversant une succession d’environnements qui le plongent dans une expérience à la fois intime et collective, physique et mentale. Elle crée un espace où les paroles étouffées par le(s) pouvoir(s) s’entremêlent, résonnent et se réactivent mutuellement. Le corps du visiteur en devient la caisse de résonance, à la manière de la chorale gospel du Centre Culturel Jean-Cocteau, avec laquelle l’artiste a travaillé lors d’une résidence, et qui incarne dans une vidéo les voix plurielles de l’exposition.
Once Upon a Time in the West, 2022
Vidéo 7’40”
Oeuvre réalisée dans le cadre d’une résidence territoriale menée par l’artiste en collaboration avec la chorale gospel du Centre Culturel Jean-Cocteau
"Cette vidéo est le fruit de ma collaboration avec la chorale gospel du Centre Culturel-Jean Cocteau et leur cheffe de chœur Julie Gay. C’est
au moment où j'étais obsédée par le drame de l’assassinat de George Floyd qui m'a bouleversée par sa cruauté pure, que l’on m’a proposée
de travailler avec un chœur de gospel. Ces deux choses se sont associées immédiatement pour penser un hommage grâce au gospel,
la musique des Afro-Américain.es qui porte leur souffrance par une forme artistique, poétique. En transformant les paroles de chants pour leur prêter les mots de Georges Floyd, on retrouve les qualités cathartiques de cette musique. J'ai aussi eu la chance de travailler avec un chœur disponible, engagé, qui a lui-même été touché par ces destins. C’est d’ailleurs une des choristes qui m'a parlé de l'histoire de Cédric Chauviat lorsque j’évoquais George Floyd lors des répétitions. Elle m'a interpellée sur les drames qui se passent aussi en France. Le chœur est emmené par sa cheffe de chœur Julie, si belle et enthousiaste. Sa direction du cœur devient une danse magnifique. Je me suis posée la question de montrer dans cette vidéo les images d'un homme qui a été assassiné. Elles sont diffusées publiquement sur les réseaux et les médias. Ses enfants, sa famille, ses proches y sont confrontés qu’ils le veuillent ou non. Après beaucoup de réflexion, je pense que convoquer ces images dans l’oeuvre est un geste éthique nécessaire pour prendre conscience de la situation qui existe aujourd'hui. En les censurant, on leur refuse leur rôle de témoins de la réalité, aussi horrible soit-elle, de la violence que vivent des centaines de milliers de personnes. Cacher cet acte criminel par les personnes qui sont censées nous protéger ne serait pas juste. Cette vidéo est le paroxysme de ce sentiment d’étouffement qui traverse toute l’exposition. Ses images nous coupent le souffle. On doit sortir, rechercher l'air" (Maja Bajevic).
L’ARTISTE
Maja Bajević (1967 | Sarajevo, Bosnie-Herzégovine)
Expositions personnelles (sélection) Migros Museum für Gegenwartskunst, Zurich, (2017), The James Gallery, New York (2012), DAAD Galerie, Berlin (2012), Museo Nacional de Arte Reina Sofia, Madrid (2011).
Expositions collectives (sélection) : CAPC, Bordeaux (2021), MAXXI, Rome (2021), Schirn Kunsthalle, Francfort (2020), La Criée, Rennes (2019), Busan Biennale (2018), MACBA, Barcelona (2017), Haus der Kunst, Munich (2016), 56e Biennale de Venise (2015), 31e Biennale de San Paulo (2015), Centre Pompidou, Paris (2009), Documenta 12, Kassel, (2007), MOMA PS1 (2004).
En 2017, Maja Bajevic a été nominée au prix Marcel Duchamp. Elle est représentée par la Peter Kilchmann Gallery (Zurich).