EVA JOSPIN, AU MILIEU DU CHEMIN
Nel mezzo del cammin di nostra vita
Mi ritrovai per una selva oscura,
Che la diritta via era smarrita.
Au milieu du chemin de notre vie
je me retrouvai par une forêt obscure
car la voie droite était perdue.
Mi ritrovai per una selva oscura,
Che la diritta via era smarrita.
Au milieu du chemin de notre vie
je me retrouvai par une forêt obscure
car la voie droite était perdue.
Dante Alighieri, Divina Commedia, 1308-1321
Le voyage mis en scène par Dante dans la Divine Comédie débute dans une forêt. Ayant perdu son chemin, le poète est immergé dans l'obscurité d'un bois « sauvage, épais et âpre ». Amorce d’une quête initiatique, le premier vers du poème est aussi la porte d'entrée de l’exposition que le centre culturel Jean-Cocteau consacre au travail d’Eva Jospin1.
Le motif de la forêt est au cœur des recherches plastiques de l’artiste. Telle une obsession, Eva Jospin en étudie avec minutie les formes, la profondeur, en réalisant des œuvres qui interrogent sa puissance évocatrice. Il ne s'agit pourtant pas d’études sur le motif2 : la nature qu'elle façonne dépeint un espace mental qui ébranle le spectateur, que ce soit par le truchement de la tridimensionnalité ou du simple crayon.
L’artiste restitue la puissance architecturale de la forêt dans des pièces monumentales en carton brut qu’elle découpe, superpose, ponce et cisèle pour créer des bois denses en haut-relief. Parallèlement, ses dessins, à l'allure de frises labyrinthiques, en esquissent l'atmosphère onirique et hypnotique. Tels des décors, ces paysages mystérieux envoutent le visiteur qui devient acteur et spectateur de son propre imaginaire.
Figuration en trompe l'œil autant qu’abstraction monochrome, la forêt-théâtre d'Eva Jospin interpelle le spectateur, ouvrant à une multitude de lectures. Tantôt berceau transculturel de contes et légendes, denrée marchande ou espace de résistance politique, la forêt reflète, à travers la subjectivité de nos émotions et expériences, un espace apaisant ou terrifiant, de perte ou de découverte. L'œuvre est « ouverte », écrit Umberto Eco3, le spectateur en est le scénariste.
Le choix du carton, matériau modeste et périssable que l'artiste récupère et transforme en œuvre, est également signifiant. De l’arbre au carton, du carton à l’arbre, Eva Jospin instaure une réflexion poétique sur la transformation de la nature par l’homme, en renversant son cycle de production. Emblème d’une société de la consommation immédiate et du libre-échange, le carton se plie au temps long de la création artistique et s’inscrit dans une iconographie millénaire, exprimant dans ce paradoxe la fragilité de la relation qui lie l'homme contemporain à la nature.
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1. Née en 1975, Eva Jospin vit et travaille à Paris.
2. Etudes réalisés à l'extérieur, dans la nature, devant le sujet.
3. Umberto Eco, Opera aperta, 1962.
Le choix du carton, matériau modeste et périssable que l'artiste récupère et transforme en œuvre, est également signifiant. De l’arbre au carton, du carton à l’arbre, Eva Jospin instaure une réflexion poétique sur la transformation de la nature par l’homme, en renversant son cycle de production. Emblème d’une société de la consommation immédiate et du libre-échange, le carton se plie au temps long de la création artistique et s’inscrit dans une iconographie millénaire, exprimant dans ce paradoxe la fragilité de la relation qui lie l'homme contemporain à la nature.
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1. Née en 1975, Eva Jospin vit et travaille à Paris.
2. Etudes réalisés à l'extérieur, dans la nature, devant le sujet.
3. Umberto Eco, Opera aperta, 1962.